L’après seconde guerre mondiale

1960

Le consumérisme

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L’industrialisation de l’alimentation et les craintes de ses répercussions sur la santé humaine deviennent un enjeu de société et trouvent une forte résonance médiatique. L’essai de Robert J. Courtine, grand prix de littérature gastronomique, L’assassin est à votre table, publié pour la première fois en 1956, est repris par les journaux aux titres évocateurs : « Défends ta peau », « La cuisine du Diable », « Le poison dans votre assiette », etc. On y évoque la mauvaise qualité du pain blanc qui le rend « indigeste » ; le vin « devenu poison » à cause des additifs de conservation ; les œufs toxiques issus de « poules mal nourries, épuisées et malades ».
Dans ce contexte, un nouvel acteur apparaît dans les processus de décision : le consommateur qui affirme ses droits à la sécurité, à l’information, à la représentation politique et à la consultation. Les premières organisations officielles de représentation des consommateurs apparaissent au lendemain de la seconde guerre mondiale avec la création d’un Bureau de la consommation au sein du ministère chargé de l’Économie, d’un Laboratoire coopératif chargé de réaliser des tests de produits, du Centre de recherches pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), chargé d’étudier l’évolution des consommations, et de l’Union fédérale de la consommation (UFC).
Le mouvement consumériste s’affirme dans les années 1960, avec la création du Comité national de la consommation (CNC), instance de débat gérée par les pouvoirs publics, et de l’Institut national de la consommation (INC). L’INC, établissement public, a pour mission d’informer les consommateurs et d’apporter un appui technique aux associations nationales de consommateurs agréées. Les associations accordent une importance croissante aux sujets alimentaires et mettent en garde contre certains dangers liés à l’alimentation.
On se souvient du conflit, dans les années 1990, entre les États-Unis et l’Union européenne à propos du bœuf élevé « aux hormones ». En 1980, l’Union fédérale des consommateurs (UFC), première association de consommateurs en France, lance le boycott du « veau aux hormones ». Prenant en compte les résultats scientifiques les plus récents, le gouvernement français demande à l’Europe d’interdire l’utilisation des hormones comme facteurs de croissance en élevage. Le sujet est inscrit sur les agendas politiques et médiatiques. En 1988, l’interdiction entre en vigueur sur tout le territoire de la Communauté européenne, qui décide également d’interdire les importations de viande bovine issue d’animaux traités aux hormones de croissance. Le conflit est porté au niveau de l’OMC, où il constitue un cas emblématique. En riposte, en 1999, les États-Unis imposeront des sanctions douanières sur divers produits européens, dont le roquefort.
Cette affaire a certainement marqué un tournant dans le comportement des consommateurs par rapport à leur sensibilité vis-à-vis de la sécurité de l’alimentation. Elle a également mis en évidence le rôle que pouvaient jouer des associations de consommateurs. Aujourd’hui au nombre de quinze agréées par l’État, elles interviennent de différentes façons pour défendre les consommateurs et sont devenues des partenaires incontournables pour les acteurs publics et professionnels. Elles sont représentées au Conseil national de l’alimentation, et forment l’un des plus gros collèges. Neuf (parmi les quinze) présentes au CNA évoluent différemment, en fonction de leurs spécificités (liste) et de leurs influences. De structures différentes (nombre de bénévoles plus ou moins élevé, profils des bénévoles différents, régions, etc.), elles apportent des regards variés qui enrichissent la concertation. Leur avis est essentiel au bon fonctionnement du CNA, car il constitue un des maillons forts de la chaîne alimentaire.